Costume roncalais

 

Costume roncalais
 

Laine, lin, soie, bijoux
 

Copie d’un costume original fabriqué dans le magasin de tissus d’Eloy Gúrpide à Ochagavia (Navarre)
 

1923
 

Inv. 581
 

Salle 11

Ce costume de femme roncalaise a été acquis par le musée en 1923. La Vallée du Roncal, située à l’extrémité est de la Navarre, est voisine de la Soule et de la vallée béarnaise de Barétous avec laquelle elle est liée par des accords pastoraux séculaires[1]. Sa situation enclavée en zone de haute montagne a permis la conservation de caractéristiques culturelles particulières, dont le port d’un costume exclusivement réservé aux natifs de la vallée, réglementé et protégé par leurs lois communes. Codifié au 18e s., il est porté jusqu’au début du 20e s.
Lors de la création du musée, le Commandant Boissel sollicite un intermédiaire, Eugène Béguerie, négociant de Tardets par ailleurs membre d’Euskaltzeen Biltzarra - association oeuvrant en faveur de la langue et de la culture basque - pour lui procurer une paire de ces costumes remarquables. L’entreprise n’est pas aisée comme le montre la correspondance entretenue par les deux hommes à l’automne 1922[2].
Par ses contacts navarrais, Eugène Béguerie obtient d’une maison d’Uztarroz, l’une des 7 localités de la vallée du Roncal, le prêt de deux costumes, les propriétaires n’étant pas disposés à s’en défaire. Il est décidé d’en faire des copies mais Eugéne Béguerie se trouve confronté à la difficulté de rassembler les accessoires et les étoffes, tissées dans les maisons de la vallée, nécessaires à leur fabrication. Il se résout à les faire réaliser à Ochagavía, village navarrais voisin de Larrau, chez l’un de ses fournisseurs, Eloy Gúrpide, négociant en tissus et produits d’épicerie qui peut se procurer l’ensemble des fournitures. Les costumes sont recréés à l’identique et Eugène Béguerie précise que, pour les monter sur les mannequins, on pourra aisément trouver des Navarraises à Mauléon : elles y sont employées une partie de l’année à la fabrication des espadrilles, notamment par les établissements Louis Béguerie dirigés par son neveu Justin Heugas qu’il cite.
Ce costume de femme correspond au vêtement porté les dimanches et jours de fêtes, il est différent de celui porté au quotidien, plus simple. Il est confectionné dans chaque maison à partir des étoffes de laine et de lin issues de l’exploitation familiale.
A partir d’une base commune, il diffère selon le statut de la femme, mariée ou célibataire, et de son âge. Il est toujours constitué d’une blouse blanche fine couverte d’un gilet noir brodé, de deux jupes bleues superposées - dont celle du dessus, relevée sur le devant et maintenue à l’arrière par une broche, laisse apparaître une doublure rouge - et d’une mantille bordée de soie.
 

[1] La Junte de Roncal ou Tribut des trois vaches, cérémonie célébrée chaque année le 13 juillet par les élus barétounais et roncalais renouvelle le traité d’Anso datant de 1375 et instaurant un accord pour la pâture des troupeaux béarnais en territoire navarrais.

[2] Lettres d’octobre à novembre 1922 – archives du musée

 

 

Le gilet richement brodé est fermé par un cordon doré terminé par un petit pompon, qui selon qu’on le porte à droite ou à gauche signifie que la jeune femme est libre ou promise. Les bijoux d’or, d’argent ou de laiton qui ornent la gorge et le décolleté sont nombreux et raffinés, ils reflètent l’aisance économique de la famille. Après son mariage, la jeune femme complète sa tenue d’une veste noire, comme celle présentée ici. Puis dans les années qui suivent, le noir chasse la couleur : le costume est identique mais paré des teintes sombres réservées aux femmes d’âge mûr.
Outre ces différences liées au statut, il existait au 18e s., quatre variantes du costume féminin festif dont la différence résidait dans la couleur de la mantille. Elle s’accordait aux quatre couleurs de l’année liturgique : blanc pour Pâques et Noël, rouge pour la Semaine Sainte et Pentecôte, violet pour l’Avent et le Carême et vert pour le temps ordinaire. Seul le rouge, comme celui de ce costume, est conservé jusqu’au 20e s. La mantille était pourvue d’un petit pompon au niveau du front (ici disparu ou oublié ?), détail ornemental qui permettait de maintenir le voile centré sur le haut du crâne.  Les deux pièces de toiles qui prolongent les pointes du foulard, faisaient office, selon la tradition, d’amulettes censées éloigner le mauvais œil.
Il était de coutume jusqu’au milieu du 19e s. d’enterrer les morts vêtus de leurs plus beaux vêtements, c’est-à-dire dans leur costume de fête. Ceci explique leur rareté et peut-être aussi le fait qu’Eugène Béguerie en 1923 ne soit pas parvenu à acquérir des originaux.